Tricosteril
Je nous tuais mais je vous somme.
En t’attendant, je bois un verre, un seul, un grand, je compense par le biais
de ma panse, je pense, je souris, je pleure aussi, mais au plus profond pour ne
pas que tu aies peur, les panneaux clignotent en silence dans une rue sans
boutique, grise comme un jour sans toi, tu comprends, il ne fera plus jamais nuit sans ton soleil.
Tu étais assise au bord du flux de mes pensées et tu m’attendais ; j’en voyais presque
les flots lécher tes chevilles. Je t’ai
reconnue, il y avait du sel sur tes lèvres. Plus je te découvre plus je
reconnais celui que j’aurais pu être, je me sens petit comparé à lui, et plus
grand aussi. Je ne sais si j’aurai la force ; j’aurai besoin, peut être, de refuges improvisés, je crois que déjà tu le
sais. Tu étais l’onde, je pensais nous laver. Mes yeux aveuglés laissent filtrer
mon erreur de principe : je suppose que je commence à croire en ce que je
refusais ; les fondations les plus solides sont aériennes, elles se
construisent à l’infini.
Tu as un vrai regard. Je n’en avais jamais croisé. Il semble qu’il s’agit du
seul vivant au milieu des regards qui se
meurent quand on ne les voit plus. Tu ne sens pas la peur qui me frôle quand je
te regarde qui regarde devant, et je n’entends même pas ses longues ailes quand
elle s’enfuit. Ton regard me rassure bien autrement que les
étincelles des certitudes. Je crois qu’il me voit. Enfin.